Biographie

Lauréat de la Villa Médicis hors les murs, Didier Ben Loulou, photographe, a obtenu une bourse du Fiacre (ministère de la Culture) puis a été récompensé par la European Association for Jewish Culture, Visual Arts Grant, Paris/Londres. En 2007, il a ouvert à l’Imec (Institut des mémoires de l’édition contemporaine) un fonds où se trouvent désormais ses archives. Il réalise depuis plus de trente ans une œuvre singulière, inclassable, dans laquelle la couleur tient une place primordiale. Ses images ont été tirées selon le procédé Fresson, depuis ses débuts, en 1979.
Didier Ben Loulou a publié Sud (Éditions de la Table Ronde, Paris, 2018) ; Des amours silencieuses (Arnaud Bizalion Éditeur, 2018) ; Un hiver en Galilée (Arnaud Bizalion Éditeur, 2018) ; Israel 80’s (1981-1985) (Éditions de la Table Ronde, Paris, 2016) ; Je t’écris devant la fenêtre de mon hôtel (Arnaud Bizalion Éditeur, 2016) ; Marseille (Arnaud Bizalion Éditeur/Le Garage Photographie, 2014) ; Athènes (Éditions de la Table Ronde, 2013) ; Mémoire des lettres (Éditions de la Table Ronde, 2012) ; Jérusalem (Éditions du Panama, Paris, 2009) ; Jaffa, la passe (Filigranes, 2006) ; Sincérité du visage (Filigranes, 2004). Il est aussi l’auteur de Chroniques de Jérusalem et d’ailleurs (Arnaud Bizalion Éditeur, 2016), sorte de journal, mêlant les réflexions et les impressions sur la photographie d’un voyageur sensible. Didier Ben Loulou vit entre Paris et Jérusalem.
En 1991, Didier Ben Loulou s’établit à Jérusalem. Il explore les méandres de la vieille ville, étudie son caractère singulier, se fond parmi ses habitants aux origines multiples. Côtoyant, lors de ses déambulations au sein de cet univers complexe diverses populations, il fait preuve d’une grande curiosité, celle d’un veilleur sensible, vigilant et lucide. Didier Ben Loulou a ainsi dessiné le portrait changeant d’une cité aux nombreuses frontières. Son chemin a croisé celui d’Emmanuel Levinas à l’occasion de deux publications : la première, en 1996, lorsque Bruno Roy, pour les Éditions Fata Morgana, lui a proposé d’accompagner de ses photographies le très beau texte du philosophe, Violence du visage ; puis, en 2004, lorsqu’il publia Sincérité du visage, dont le texte est signé de Catherine Chalier, grande commentatrice du penseur de l’altérité. Ce livre, inscrit dans la lignée levinassienne, ouvre cependant de nouvelles perspectives quant à l’interprétation des visages ; il révèle la corruption des regards et celle, non moins évidente, des valeurs, qui aboutit à une série d’idées toutes faites sur le bien et le mal. Jaffa, la passe est un projet qu’il commence à mener en 1983. « Je suis sur un territoire très circonscrit qui est un faubourg, un quartier de Jaffa, Adjami. C’est un lieu chargé d’histoire. Là aussi on a un va-et-vient de populations. On est dans l’exil des uns et l’asile des autres. » Mémoire des lettres montre que l’écriture n’a jamais été absente de l’œuvre de Didier Ben Loulou. Il y effectue un patient travail sur les lettres, principalement celles gravées sur les stèles du cimetière de Safed en Galilée, et celles du mont des Oliviers. Le photographe parcourt le monde comme un lecteur à la recherche de signes. La lettre est toujours présente dans son œuvre : des inscriptions hébraïques les plus sacrées, aux affiches profanes qui recouvrent les murs de Jérusalem ou aux tags des ruelles arabes. La lettre transcende en effet ces deux catégories que sont le sacré et le profane pour établir une sorte de lien entre les hommes, qu’ils soient vivants ou morts. En 2006-2009, il mène un projet sur Athènes : les gens du voyage mêlés aux migrants, la rencontre du tiers-monde et du quart-monde à la périphérie de la capitale. De son livre de photographies en noir et blanc, Israel 80’s, il dit : « Je me souviens de la rue Ruppin à Tel-Aviv. Je m’en souviens grâce aux images. Elles ont dormi plus de trente ans dans l’appartement parisien de mes parents. Elles attendaient que je les retrouve. Les planches-contacts sont comme ces petits morceaux de papier japonais dans la tasse de Proust. Elles ne demandent qu’à éclore. Réminiscences, souvenirs mais documents avant tout. Nous sommes entre 1981 et 1985. » Un hiver en Galilée dépeint, sur un mode inattendu, son existence solitaire durant tout un hiver passé à Safed, petite ville de Galilée. Il retient les menus événements qui jalonnent la vie de ses habitants. Le photographe part à la recherche de la dimension secrète et spirituelle de cette ville qui fut au xvie siècle un haut lieu du mysticisme juif. Sud retrace son long périple autour de la Méditerranée, errance lors de laquelle il court le risque de confondre villes et paysages traversés. Il poursuit son existence nomade entre Tel-Aviv, Marseille, Jaffa, Athènes, Palerme, Safed, Salonique, Ajaccio. Depuis peu, il travaille à un nouveau projet sur la Corse, quintessence selon lui de la Méditerranée, grâce à laquelle il questionne le ré-chantement et un bonheur possible dans un monde de plus en plus chaotique. « Je veux être un simple passeur de ce qui se dévoile à moi silencieusement et en secret. »
Les œuvres de Didier Ben Loulou sont régulièrement exposées en Europe et aux États-Unis. Elles sont également présentes dans de nombreuses collections privées et publiques : Fonds national d’art contemporain (Paris), Victoria & Albert Museum (Londres), Museum of Fine Arts (Houston), Maison européenne de la photographie (Paris), musée d’Art et d’Histoire du judaïsme (Paris), Museum of Modern Art (Tel-Aviv), Microsoft Art Collection (Seattle, USA), Fonds régional d'art contemporain de Basse-Normandie (Caen), Bibliothèque Nationale de France (Paris), etc.